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23 août 2015 7 23 /08 /août /2015 01:05
(Almost) naked in LA at 32

A lire en écoutant : Drinking in LA, Bran Van 3000

C'est à cause d'une petite chanson de Woody Guthrie, chantée par Billy Bragg et Wilco. Ma première nuit en Californie, je pouvais seulement l'imaginer sous les étoiles. Tout comme à 10 ans, je ne me voyais pas autrement qu'en star de la NBA à 30. Encore raté.

C'est sous le toit d'un parking couvert de supermarché que j'ai finalement fermé les yeux cette nuit-là, à San Diego. C'est le prix à payer pour faire les malins sur les réseaux sociaux avec nos photos insupportables de mecs en vacances pendant des mois dans des endroits magiques. Oui, la plupart du temps, nous ne sommes que des vagabonds errant de parking en parking à la recherche d'une place à l'abri du violent soleil matinal, des drogués et du regard des gardiens zélés. Ce genre de vie entraîne quelques désagréments beaucoup moins amusants que faire des selfies devant un coucher de soleil au Grand Canyon.

(Almost) naked in LA at 32

Il y a toujours deux Amériques. Il y a les Républicains et les Démocrates. Il y a l'anglais et l'espagnol. Il y a la NRA et les anti-armes. Il y a Lebron James et Stephen Curry. Il y a les french fries et les mashed potatoes. Il y a les Américains avec le cœur sur la main, qui s'inquiètent toujours de savoir si tout va bien pour toi, et ceux prêts à te coller un procès ou à te chercher des noises à chaque instant.

C'est une représentante de cette dernière catégorie qui nous a interpellés lors de notre premier réveil dans la Cité des Anges (mon cul, oui). Ejectés la veille d'un parking de Walmart par la sécurité, nous nous sommes garés dans la rue pour dormir. Au matin, une sorte d'Oprah Winfrey qui aurait sauté la séance de maquillage prenait quelques photos du camion. Plus d'une fois, certains de ses compatriotes se sont montrés impressionnés par l'équipement de notre maison roulante ("Vous avez un évier, mais c'est extraordinaire !!!!!!", "Oh my god, il y a même un micro-ondes !!!", "Vous pouvez dormir à 4 là-dedans, mais c'est formidablement génial !!!!" Il est à noter que ces traductions ont été volontairement édulcorées afin de ne pas trop choquer le Français moyen, peu habitué aux excès d'enthousiasmes répétés des Américains). Les yeux encore collés, mais le menton fièrement relevé, je me suis approché de la gentille dame. "Vous n'avez pas choisi le bon endroit pour dormir", m'a-t-elle lâché. Bon, n'ayant pas encore décelé ses intentions belliqueuses, j'ai risqué une petite explication : "C'est la sécurité du Walmart qui..." La fin de cette phrase a été emportée dans la vague de dédain émanant de mon interlocutrice : "Vous étiez en sous-vêtements devant une école, j'ai appelé la police", balança-t-elle laconiquement tout en prenant notre plaque d'immatriculation en photo. En effet, dans la précipitation de la veille, nous nous étions garés devant un établissement scolaire. En effet, alors que j'étais en short de bain, la porte du camion était légèrement ouverte quand j'ai enfilé mon T-shirt. En effet, elle était complètement con. Je ne vous apprendrais rien en soulignant le fait qu'en Californie, on croise autant de gens en maillots de bain que de fast-food. Non mais quelle blague !

(Almost) naked in LA at 32

Bref, on a tout plié en vitesse et à notre connaissance, aucun mandat n'a été émis contre nous. C'est ainsi que l'on continue à écumer cet Etat mythique et ses plages légendaires, entre deux parkings glauques. Newport Beach, Manhattan Beach, Venice Beach, Santa Monica, Malibu et bien d'autres ont contribué à me parer d'un bronzage que ne m'a jamais donné le soleil de Lozère ou de Lot-et-Garonne. C'est entre un plongeon dans le Pacifique, une baignade au pied de chutes exceptionnelles dans le Yosemite National Park et des milliers de kilomètres de route, que j'ai finalement visé juste sur une de mes prédictions. Quelques semaines avant de laisser mes 32 ans sur le bord d'une route américaine, j'ai savouré une bière au 12e étage d'un hôtel de Los Angeles. Tout ça pour une autre petite chanson. Quel parcours !

Yes, I'd give my life to lay my head tonight
On a bed of California stars
I'd like to dream my troubles all away
On a bed of California stars
Jump up from my star bed and make another day
Underneath my California stars.

Billy Bragg and Wilco

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29 juillet 2015 3 29 /07 /juillet /2015 02:54

A lire en écoutant : Summertime, The Head and the Heart

Nous nous sommes levés aussi moites qu'une bouteille d'huile renversée oubliée depuis cinq ans dans un placard. La nuit avait commencé dans un fast food miteux, s'était poursuivie dans un garage louche pour cause de clou dans un pneu avant d'échouer sur une aire d'autoroute bondée de camions.

L'enfer. Le bruit du moteur des camions, tous en action pour balancer de la clim aux chauffeurs, conjugué à une chaleur écrasante même en pleine nuit, ont fait de ces dernières heures en Arizona un enfer. La Californie, ça se mérite.

L'enfer, c'est les autres camions

Pour atteindre cet eldorado, notre première mission fut de traverser des canyons. C'est à Kanab, mignonne petite bourgade de l'Utah, totalement Far West, que nous avions garé le van quelques jours plus tôt. Notre objectif : triompher à une loterie quotidienne pour faire partie des 10 chanceux autorisés à visiter un site exceptionnel appelé The Wave. Notre résultat : raté. Six fois.

Chaque matin, nous avons rangé notre frustration au fond du camion pour parcourir la région. Avec deux des parcs qui resteront dans les highlights du voyage. Si un jour vous songez à quitter la planète, allez faire une balade en plein coeur de Bryce canyon, vous serez servis.

L'enfer, c'est les autres camions

Encore plus génial, pour un grand enfant comme moi, Zion National Park. C'est un peu un mélange entre deux de mes parcs préférés d'Australie, le Mutawintji et le Karijini. Du rouge, du vert, du orange en pleine montagne, et des gorges hallucinantes dans lesquelles on peut se perdre, en arpentant le site à même la rivière. Un paysage sauvage et préservé où l'on est même parvenu à se débarrasser de la cohue de touristes. Franchement, tout cela donnait envie de se mettre à courir tout nu. Peut-être même qu'on l'a fait, mais je ne vous le dirai pas.

L'enfer, c'est les autres camions

Restait à affronter le Grand Canyon, en Arizona. Qui est beaucoup trop Grand, justement. Après s'être tapé une descente de plusieurs heures sous un soleil assez véhément, pour un total d'environ 1000 mètres de dénivelé, nous n'avons même pas vu le Colorado. Il aurait fallu s'envoyer encore quelques heures de marche, mais on avait un coucher de soleil à admirer depuis le haut du Canyon. Juste un mot pour cela : majestueux (et je pèse mon mot).

L'enfer, c'est les autres camions

Avant notre nuit de cauchemar, l'Arizona nous avait réservé un petit cadeau pour notre départ. Beaucoup moins connu que les autres précédemment cités, le Saguaro National Park, près de Tucson, est une petite merveille. Bon, n'essayez pas de vous arrêter faire une rando dans le coin. Si vous ne finissez pas en toast, c'est un serpent ou un scorpion qui se chargera de vous. Mais impossible de rater la route qui traverse ce paysage bordé de cactus, comme dirait Francis. Fabuleuse (heureusement que c'est la fin du billet, je n'ai plus de superlatif en stock). Je vous laisse en juger sur la photo. Rendez-vous en Californie !

Le vent souffle en Arizona
Un état d'Amérique dans lequel Harry zona
Cow-boy dingue du bang bang du flingue
De l'arme, du cheval et de quoi faire la bringue...

MC Solaar

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19 juillet 2015 7 19 /07 /juillet /2015 01:55
Y en a pas marre des monuments

A lire en écoutant : The wild hunt, The Tallest Man on Earth

Tout est une question de contexte. Si tu te coinces le doigt dans une porte au moment précis où Kirsten Dunst te délivre un clin d'oeil, ta mémoire va imprimer le deuxième événement. Achète ta plus belle chemise le jour du décès de Bruce Springsteen, elle ne sera plus bonne qu'à essuyer la vaisselle (oui, parce que si tu lis mon blog, tu aimes Bruce).

Parfois, tout est en place. Les gens, le lieu, le temps. Durant une vingtaine de minutes, le 5 juillet dernier, je peux vous assurer que je n'ai pas pensé à Kirsten. Encore moins à Bruce. La veille, un couple d'amis montois, Julien et Julie, était venu gonfler la taille de notre petite troupe pour quelques jours. Première destination pour tous les six : Monument Valley.

Y en a pas marre des monuments

Vous avez vu des centaines de fois ce paysage de l'Ouest américain. Sur un guide, à la télévision, au cinéma ou sur les photos de vacances de votre oncle. Nous aussi. Pas le moindre élément de surprise, assurément pas le genre de visites que je préfère habituellement. C'est là qu'intervient le contexte.

Nuit tombante, coucher de soleil en approche. Après deux heures sur les routes poussiéreuses du parc géré par les Navajos, nos deux véhicules atteignent un point de vue désigné comme le meilleur au crépuscule. Personne sur le parking sablonneux, une première goutte sur le pare-brise. Puis un déluge de pluie, de couleurs, de cris, de bonds et de sourires. A gauche, la noirceur de l'orage s'empare des formations rocheuses du décor, tout en laissant deviner les lignes incroyables de ces reliefs mythiques. Marc et Julien, seuls face à l'orage, en première ligne quelques mètres devant les autres, hurlent en agitant les bras. Sur notre droite, baignés par les derniers rayons de la journée, deux arc-en-ciel se disputent une partie du paysage. A tout moment, on s'attend à voir surgir John Wayne ou une troupe d'indiens à cheval (en fait, pas du tout, on sait bien que ni l'un ni l'autre ne sont encore de ce monde, mais certains clichés sont durs à éviter).

Y en a pas marre des monuments

Dans ce lieu visité par des millions de touristes chaque année, on a eu l'invraisemblable chance de vivre cet instant seulement entre nous. C'était à pleurer, mais il y avait déjà bien assez de flotte. On n'a jamais autant aimé l'orage.

On l'a même détesté dès le lendemain quand il a forcé le report de notre passage à Antelope Canyon. Un autre endroit magnifique dont la nature a le secret, comme les méandres du Colorado à Horseshoe Bend. Je vous raconterai bien mais il est dur de résister à la piscine qui me fait face dans ce motel de Scottsdale, Arizona. Un bisou, je vous reviens dès que je peux avec du canyon à la pelle !

I'm a poor lonesome cowboy
I'm a long long way from home
And this poor lonesome cowboy
Has got a long long way to roam
Over mountains over prairies
From dawn till day is done
My horse and me keep riding
Into the setting sun.

Lucky Luke

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3 juillet 2015 5 03 /07 /juillet /2015 06:22
Quatre garçons dans le van

A lire en écoutant : San Ou, Dezil

C'était aussi compliqué que de faire du monocycle avec un pneu crevé (oui, j'y pense encore) ou de ne pas demander les Lacs du Connemara au DJ dans un bal de campagne. Les obstacles nous sont tombés dessus comme la pluie sur Gene Kelly. Entre les cascades en Pennsylvanie et les passeports qui se planquent dans les bagnoles pour éviter la rencontre avec les douaniers américains, ça commençait à sentir mauvais. La vérité, c'est que ça sent toujours pas mal mauvais étant donné la fréquence de nos rencontres avec des douches.

Mais revenons-en à notre exploit. Aujourd'hui, nous sommes quatre. Comme les Trois mousquetaires. Vendredi dernier, le dernier élément est arrivé à Denver (avec 48 heures de retard, à cause du passeport timide) pour compléter cette belle équipe, formée il y a dix ans dans les couloirs de l'Université Bordeaux 3 (c'est comme Harvard, mais près d'Arcachon). Vous connaissez déjà Marco, mon équipier de l'expédition au Cap Nord. Les deux autres, Laurent et Kevin, en avaient assez de simplement commenter ce blog, alors ils sont venus le vivre en direct. Nous roulons à présent vers la Californie (enfin, pour le moment, on est en caleçon dans un hôtel de Salt Lake City en train de savourer le retour à la civilisation après une semaine perdus dans le Yellowstone), où deux d'entre nous reprendront le chemin de la France au mois d'août. Laurent et moi, nous poursuivrons pendant trois mois, le temps de rentrer à Montréal en visitant quelques trucs.

Jusqu'à maintenant, et on l'espère jusqu'au bout, on se contente de vivre des moments mythiques. Vous savez, ce genre d'expériences qui vous paraissent surréalistes quand vous les transformez en simple phrase. Des phrases qui vont nous faire passer pour des gens insupportables à notre retour, mais on assume. Quelques exemples, avant de se barrer vers le Grand Canyon :

Quatre garçons dans le van

- " On est arrivé à Chicago par l'Interstate 94, le soleil déclinant sur la skyline, avec Bruce Springsteen à fond dans un van immatriculé au Québec." Ville superbe, même si le passage a été trop court. Nous avons tout de même eu le temps de discuter, quelque peu éméchés, avec la population locale. Notamment une jeune femme qui paraissait éduquée, avant de nous demander si Paris, c'était en France.

- " Cela me rappelle cette partie de pêche près de Chippewa Falls, dans le Wisconsin, la clope au bec. " C'est dans le lac Wissota que j'ai jeté une canne à l'eau pour la deuxième fois de ma vie. Comme on est tous non-fumeurs, on a décidé de se rouler des cigarettes pour avoir du style. C'était pas mal raté, et la canne a cédé à la première touche. En un mot, du bonheur.

- " J'ai chanté Choop choop song de Cher en karaoké devant 100 habitants du Colorado dans un bar de Boulder. " Le public n'a pas levé un cil, hormis Marc et Laurent, debout sur un banc. Un grand moment de solitude comme on aimerait en vivre plus souvent. Sinon, Boulder, c'est très sympa.

Quatre garçons dans le van

- " On a pêché dans le lac Yellowstone pendant que le camion était au garage pour la vidange. On a mis du temps pour rentrer au camping, il y a avait des bouchons dus aux bisons. " C'est tout le paradoxe du Yellowstone. Un endroit magique et sauvage, mais aussi bondé et épuisant. Il y a l'activité volcanique (geysers et odeurs de souffre), le grand canyon de la rivière Yellowstone (wow, la cascade), les troupeaux de bisons qui traversent la route (majestueux, cet animal). Et les stations essence, les garages, les parkings géants.

- " J'ai chanté du Sardou, du Goldman, du Dave et tout un tas d'autres conneries dans quasiment tous les Etats des USA avec trois de me mes meilleurs amis. " Et aussi du Dezil, hein !

Pour danser avec le plaisir,
Le soleil, les orages,
Pour échapper aux souvenirs,
Dangereux marécages :
Les voyages, les voyages
Les voyages, les voyages

Jeanne Moreau, Les Voyages

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25 juin 2015 4 25 /06 /juin /2015 01:53
Chauffard away from L.A.

A lire en écoutant : Tomorrow is another day, Helen Shapiro

Il y avait la nuit où j'ai démonté un road train en Australie. Il y aura désormais la matinée où j'ai pulvérisé un van de six mètres en Pennsylvanie. Si la première activité m'avait demandé quelques heures de labeur, je me suis acquitté de la seconde tâche en moins de deux secondes.

Gonflés d'enthousiasme et baignés par le soleil, en ce mercredi 10 juin, Marc et moi nous dirigions tranquillement vers le pays Amish. C'était juste parfait. Puis, sur l'autoroute 81, en direction du sud, parcourant nos premiers mètres en Pennsylvanie, l'équation fatale : pneu qui éclate à 100 km/h, coups de volant hasardeux, talus, fin de partie.

Comme chaque jour, notre véhicule avait démarré au quart de tour au moment du départ. Il a fini en trois quarts de tour dans le décor. Même pas le temps d'avoir peur, et on était couché sur le côté gauche du camion, perpendiculaire à la route. Chacun s'assure que l'autre est en pleine forme, puis on s'extirpe de ce qui est devenu une épave. Soulagés. « Tout allait bien jusqu'à ce que tu décides de tondre la pelouse », lâche ce petit marrant de Marco, constatant la belle ornière que j'ai laissée en souvenir de mon passage dans cet Etat déjà maudit.

Bien sûr, je pourrais écrire des tartines sur cet événement. Mais ce ne serait pas juste. Il volerait la vedette aux 10 jours qui ont précédé, passés à admirer la Nouvelle-Angleterre. C'était une grosse tuile, mais nous l'avons laissée derrière nous, rebondissant au plus vite en achetant un autre van. Je profite actuellement du confort de sa banquette arrière, en écrivant ces lignes, sur une route du Wisconsin. Avant d'en finir avec cette acrobatie, un gros merci à tous ceux qui nous ont envoyé leurs ondes positives et leurs encouragements, et les amis à Montréal pour leur réconfort pendant la semaine de réorganisation du trip. Pour citer à nouveau ce grand penseur qu'est Marc, ce n'était finalement qu'un « arrêt au stand ».

Chauffard away from L.A.

Avant le drame, je me préparais à écrire mon premier article du voyage sur le mode : c'est fou comme tout va bien. Aucun accroc n'avait émaillé notre passage sur la terre des premiers colons américains. Tout nous réussissait. Pas le moindre type bizarre sorti d'un roman de Stephen King a tenté de nous découper dans le Maine, notre après-midi au stade mythique des Red Sox de Boston (c'était assez comique d'essayer de se renseigner sur les règles du baseball sur Wikipedia pendant la partie) s'est soldé par une victoire de l'équipe locale après une incroyable remontée, la pluie nous a épargnés à Nantucket, cette île un peu hors du temps au large de Cape Cod où les baleiniers abondaient au XIXe siècle. Pas de panne, pas de démêlés avec les forces de l'ordre malgré nos habitudes de vagabonds, à savoir dormir un peu n'importe où dans le van. Un bonheur. On s'est même cultivé tout au long de notre escapade, avec notamment un saut à Bretton Woods, petite cité coincée dans les montagne du New Hampshire (l'Etat avec la plus belle des punch line : « Live free or die ») où quelques types importants ont décidé de l'avenir économique du monde à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Saviez-vous également que la sœur de JFK, dont la famille vient de la région, a été lobotomisée sur ordre de son père, qui ne la jugeait pas au niveau de ses autres enfants ? C'est aussi ça, le road trip. Apprendre. C'est ce qu'on va faire dans les cinq mois à venir, quoiqu'il arrive.

Stay hard, stay hungry, stay alive.

Bruce Springsteen, This hard land

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29 mai 2015 5 29 /05 /mai /2015 18:34
La route de Los Angeles

A lire en écoutant : I'm out to get, Billy Bragg and Wilco

J'ai écouté cette chanson des centaines de fois. Elle a tellement résonné dans la Twingo ces dernières années, en France, que les notes en imprègnent certainement encore les sièges. J'ai hurlé les paroles au péage de Moissac, quand je quittais cette vie et ce travail minables pour rejoindre Toulouse ou Bordeaux pour le week-end ; sur la départementale entre Agen et Auch ; en évitant les chevreuils sur l'asphalte landais ou encore sur l'A89 en pleine Corrèze. Chaque fois, j'imaginais un autre paysage autour de moi. Le Nebraska, la Caroline du Nord, le Nevada, la Californie. Qu'importe l'Etat, pourvu qu'ils soient Unis.

Je rêvais des USA, parce qu'un jour, en marchant dans les rues de ne je sais quelle ville, je me suis dit que ce serait sympa d'y passer trois mois sur la route. Qui sont devenus six, au gré des contrats précaires qui s’empilaient, gonflant mon budget. Cette envie de vagabonder chez l'ogre impérialiste ne me vient pas d'une fascination pour le règne du dollar ou d'une sympathie pour les créationnistes fêlés, mais de tout ce qu'on trouve derrière l'Amérique de la famille Bush. Ce qui me plaît, c'est cette troupe sur le Mayflower qui gribouillait déjà les prémisses d'une Constitution qui inclut le droit au bonheur.

Dans quelques heures, je vais me lancer dans une aventure qui me mènera sur les traces du génial Thoreau et de son étang de Walden (levez les yeux, et appréciez encore une fois la citation qui orne le titre du blog !), dans le paysage d'Asbury Park afin de me sentir comme sur une pochette de disque de Bruce Springsteen (si vous n'avez jamais vu la couverture de son premier album, Greetings from Asbury Park, c'est le moment d'aller dans Google image), au milieu de la route empruntée par Lewis et Clark (on a tous rêvé d'être un explorateur, non ?), au coeur des pages d'un roman de Jim Harrison ou de Edward Abbey...

Des années après l'avoir annoncé, je vais donc prendre la route de Los Angeles (un bouquin de John Fante qui est évidemment dans ma valise) au volant (partagé avec trois autres personnages dont on reparlera) d'un superbe van de marque américaine, plus grand et mieux équipé que la plupart des appartements que j'ai habités en France avant mon retour au Québec.

La route de Los Angeles

J'ai remarqué il y a quelques temps, en jetant un oeil sur des photos d'anciens voyages, qu'il était facile de voir quand j'étais heureux. J'écarte les bras comme pour embrasser tout ce qui se trouve en face de moi. Je sens que dans les six mois à venir, je vais avoir mal aux épaules !

A part écrire et penser, tu aimes avant tout marcher. De cela aussi, il doit être possible de faire un métier : vagabond. Sans-logis. Va-nu-pieds. Promeneur. De tout temps, il y a eu des vagabonds. Mais aujourd'hui c'est un métier en voie de disparition. En tout cas dans un Etat-providence comme la Norvège. Et tu te dis : quelqu'un doit défendre ce métier. Quelqu'un doit se charger de cette responsabilité. Quelqu'un doit préserver cette liberté, cette fierté, réhabiliter ce travail, cette dignité ; oui, tu veux être promeneur."

Tomas Espedal, Marcher (ou l'art de mener une vie déréglée et poétique)

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28 janvier 2015 3 28 /01 /janvier /2015 18:47
This land is my land

A lire en écoutant : Blinded by the light, Bruce Springsteen

C'est pour ce genre de journée que j'aime tellement Montréal. Celle, comme aujourd'hui, où le ciel tourne le bouton lumière au maximum. Le thermomètre glisse tranquillement vers les moins 20, mais les yeux, comme toutes nos capacités, sont éblouis. Tu sors tête nue, les gants restent dans les poches du blouson, mais tu n'as pas froid. Pendant quelques minutes au moins, le soleil arrive à te le faire croire en tout cas. Puis la réalité te rattrape mais c'est une sensation tellement vivifiante que tu es heureux de sentir des stalactites prendre forme dans tes narines.

Je ne pouvais donc rêver meilleures conditions pour me rendre au Consulat des Etats-Unis. Après avoir il y a quelques semaines rempli un formulaire en ligne et payer 160 dollars, j'avais en effet rendez-vous là-bas pour tenter de décrocher un visa répondant au doux nom de visa B2. Son intérêt : me permettre de rester six mois chez Barack au lieu des trois prévus avec un visa touriste traditionnel. Pour l'obtenir, j'avais appris que le plus important était de prouver à l'agent en face de toi que tu n'allais pas rester squatter dans leur pays. Bref, des preuves genre un employeur qui te récupère à ton retour ou un logement qui t'attend sont grandement conseillés. Mais je ne pouvais pas compter sur tout ça. En approchant du consulat, j'ai saisi le ridicule de la situation. J'ai tout fait ces dernières années pour être le plus libre possible au moment de faire ce voyage, et c'est cela qui allait peut-être m'empêcher d'aller au bout du rêve.

La vue était superbe depuis le 19e étage de l'immeuble, en plein centre-ville. A l'est, la tour du stade Olympique saluait celles de Brébeuf, plus au Nord. En face de moi, les buildings crachaient leur fumée blanche sur fond de ciel parfaitement bleu, juste devant ce bon vieux mont-royal. J'aurais bien pris une petite photo, mais mon iPod et mon téléphone avait été confisqués à l'entrée, où j'ai eu le plaisir de subir une fouille complète. C'est ça de mettre un pied aux USA, même en plein Montréal.

Pour patienter avant ma rencontre avec l'agent, au milieu d'Asiatiques, de Maghrébins et autres Indiens, j'ai jeté un oeil à la petite télévision projetant quelques images du pays. Notamment de Dwayne Wade, un basketteur aux mollets légèrement plus puissants que les miens en train de martyriser des défenseurs en leur dunkant dessus. Puis, derrière la petite fenêtre de son guichet, un gars en chemise blanche a agité deux de ses doigts dans ma direction. Le moment de vérité. Enfin, c'est ce que je croyais.

This land is my land

Après quelques vérifications, je commençais à prendre confiance. En plus, le type parlait en français ! Puis il m'a demandé une photo d'identité. J'ignorais que c'était nécessaire, mais heureusement j'en avais une qui traînait dans mon portefeuille. Il l'a prise, puis a jugé qu'elle n'était pas assez récente. J'ai dû redescendre les 19 étages (bon, ok, en ascenseur), lâcher 10 dollars supplémentaires dans un petit photomaton installé au rez-de-chaussée, avant de revenir devant l'agent. Qui, après une session empreintes digitales, m'a renvoyé vers la deuxième étape. Ah bon, il y a une deuxième étape.

Je me suis retrouvé devant un autre guichet, pour le vrai entretien. Derrière la vitre, une femme d'une trentaine d'années, lunettes, cheveux noirs, quelques kilos en trop, un coke diet à portée de main. En anglais, sa première question a été "vous avez un travail ici ?". Avant de lancer, avec un impeccable dédain : "vous venez d'immigrer et vous voulez déjà partir ?" Elle était aussi froide que peut l'être un 28 janvier à Montréal. Elle m'a demandé de l'excuser une seconde, et durant les 10 minutes de son absence je me suis questionné sur cette incroyable capacité à devenir aussi indifférent. J'imaginais la scène le matin : "John, tu as encore rangé ton humanité dans mon casier, où est-ce que je vais mettre la mienne ?"

OK, ces gens ne sont pas là pour danser le madison avec vous. Mais on a beau être préparé à ça, c'est toujours assez déstabilisant. Surtout avec un anglais aussi riche qu'un chômeur en fin de droit. A son retour, l'interrogatoire s'est poursuivi, avec l'impression que je donnais toujours la mauvaise réponse. "Qu'est-ce qui vous dit que vous allez retrouver du travail à votre retour ?" "Pourquoi vous n'essayez pas de trouver tout de suite un emploi dans votre branche au lieu de partir six mois ?" "Où prévoyez-vous d'aller ?"

Ah, là, j'étais préparé. J'avais imprimé un bel itinéraire pour faire sérieux. Mais quand j'ai amorcé un geste pour le sortir de sa pochette, elle m'a arrêté : "just say me". "Je vais d'abord aller dans l'Ouest, en passant par Chicago et..." "Chicago, c'est dans le Midwest", a-t-elle lancé sans m'accorder un regard. Mal barré. C'est foutu. Il n'y a plus qu'à réfléchir au plan B...

"Vous avez de la famille aux Etats-Unis ?" No, précisais-je ravi d'avoir enfin fait une réponse sans faute de grammaire. "Pas de petite-amie non plus ?" Je n'avais même pas eu le temps d'esquisser ma réponse négative qu'elle était déjà en train de se tourner, décidant certainement qu'il ne pouvait en être autrement pour un hurluberlu comme moi. Elle a bredouillé quelque chose, lançant mon passeport dans une corbeille derrière elle. Sans prévenir, elle avait mis fin à l'entretien. Je n'étais pas sûr d'avoir bien compris, alors elle a répété, avec autant de plaisir que si on venait de lui arracher trois dents sans autre anesthésie qu'un coup sur la tête : "votre visa sera prêt dans une ou deux semaines." J'ai déguerpi avant de prendre un coup de fouet, avec l'air hébété du type qui n'a pas trop compris ce qu'il venait de se passer. La jeune fille de l'accueil a tout de même repéré mon sourire idiot : "c'est bon ?" s'est-elle permise. "Ouaiiis" !

From California to the New York island ;
From the red wood forest to the Gulf Stream waters
This land was made for you and me.
Nobody living can ever stop me,
As I go walking that freedom highway ;
Nobody living can ever make me turn back
This land was made for you and me. "

Woody Guthrie, This land is your land

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27 décembre 2014 6 27 /12 /décembre /2014 17:58

A lire en écoutant : ça s'en vient !

Le cauchemar est passé. Pendant quelques semaines, nous avons tous dû endurer la "magie" auditive de Noël, ingurgitant l’indéboulonnable Tino Rossi tout en supportant Mariah Carey en mère Noël. En guise de cadeau, j'ai ainsi décidé de vous proposer quelque chose de bien plus efficace qu'un coton-tige de supermarché pour vous récurer les oreilles en douceur (attention, ceci est une métaphore, et l'écoute, même prolongée, des artistes évoquées ici ne peut vous exempter de l'utilisation de coton-tiges !). Mon choix s'est porté sur cinq jeunes femmes dont je tombe inévitablement amoureux à chaque fois qu'elles ouvrent la bouche. En plus de voix sublimes, elles ont toutes des noms aussi bizarres que cools, et viennent de coin de la planète qui me vont rêver. Bref, tout est poésie chez elles (insérez ici un smiley papillon) !

Punky family

Nanna, Hope et les autres

Elle vient d'un pays où les pigeons sont punk. Déjà un bon point pour elle. Pour ceux qui ne suivent pas, il s'agit de l'Australie. Elle a d'ailleurs sobrement intitulé son dernier disque Oz, où figure le titre sympathique Nye. Pour mieux découvrir Missy Higgins, c'est son nom, je vous conseille également de jeter une oreille à Going North, un titre de chanson qui me fait toujours rire pour un pays où le Nord est une notion toute relative selon nos critères européens !

Punky familiy (bis)

Nanna, Hope et les autres

Missy est née à Melbourne, Julia à Sydney. Toutes les deux nous viennent du pays où l'on fête Noël en maillot de bain. Tout ça est vraiment très intéressant mais pas autant que la voix unique de Julia Stone, connue pour ses albums avec son frère Angus (encore un avec un nom bizarre mais cool !) mais aussi solo. Plongez-vous donc quelques minutes dans And the boys et Hollywood !

The head, the heart and the voice !

Nanna, Hope et les autres

Quittons maintenant l'Australie pour le Nord-Ouest des Etats-Unis, plus précisément la ville de Seattle. C'est là-bas que s'est formé le groupe The Head and the Heart, avec en son sein cette jolie blonde qui joue du violon, mais aussi de l'harmonica. Une fois qu'on a dit ça, elle a déjà marqué pas mal de points chez moi ! Je regrette toutefois que le groupe n'utilise pas plus ses capacités vocales, comme sur la chanson titre de l'album Let's be still où on ne lui laisse qu'un misérable couplet. Il faut attendre la fin du disque pour la voir tout déchirer avec la chanson These days are numbered, avec des paroles pleines de poésie ("We all complain if it rains or it shines, But we're never mad at the moon") et un solo d'harmonica qui tue. Ah oui, j'ai oublié de vous donner son nom, qui tue tout autant : Charity Rose Thielen.

Super Nanna

Nanna, Hope et les autres

J'ai toujours aimé Nana Mouskouri. Je me rappelle très bien la première fois que j'ai été confronté à son talent. Nous étions en 1988, je venais de... Bon OK, c'est du bluff. Comme tout le monde j'imagine, je n'ai jamais entendu Nana Mouskouri ailleurs que dans une pub Fébrèze (à moins que ce ne soit Air Wick...). C'est plutôt de Nanna Bryndís Hilmarsdóttir dont je vais vous parler. L'Islandaise a commencé à ensorceler le public avec sa voix dans un projet solo, Songbird. Pour vous réchauffer, je vous dirige tout de suite vers la chanson Hawaii issue de cette période. Puis Nanna a jeté la serviette (désolé) dans ce projet, pour devenir l'un des piliers du groupe Of Monsters and Men. Elle a ainsi posé sa voix sur le titre Slow and steady, certainement l'une de mes chansons préférées de ces dernières années !

Hope, hope, hope... houra !

Nanna, Hope et les autres

Nous voilà rendu au top du top du top. La première fois que j'ai entendu ce superbe timbre de voix, c'était sur une route australienne. J'étais aux anges, et le plaisir n'a pas diminué depuis. Il s'agissait de la version accoustique de la chanson Bells ring, de Mazzy Star. J'ai ensuite découvert la version originale, tout aussi excellente. Je me suis alors lancé dans la découverte des trois albums datant des années 90 de ce groupe californien, mené par la géniale Hope Sandoval. Je vous laisse savourer, par exemple, le titre Halah. Ensuite, Hope a mis ses talents vocaux aux services du groupe Hope Sandoval and the Warm Inventions le temps de deux disques. Impossible de trouver plus apaisant ! Je vous laisse juger avec Suzanne et Blue Bird, une autre de ces chansons dont je ne me lasse jamais. L'année dernière, Mazzy Star est revenu avec un album contenant quelques pépites, comme In the Kingdom.

Voilà, si vous ne savez pas quoi m'offrir l'année prochaine, vous n'avez qu'à les réunir toutes les cinq dans mon salon pour un petit concert privé ! Je suis sûr qu'elles pourraient faire des miracles même en chantant Petit Papa Noël !

À l'hôpital quand je mourrai d'une extinction de voix
Les oreilles seront débouchées en souvenir de moi
Je chanterai au paradis pendant des millénaires
Jésus, les anges et Dieu aussi s'enfuiront en enfer.
Je chante comme une casserole
Et je m'y fais revenir à maintes reprises
Mon look de sex-symbol
Vous fait oublier cette torture auditive."

Je chante comme une casserole, Les colocs

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13 novembre 2014 4 13 /11 /novembre /2014 04:10
"Vous voulez un sac ?"

A lire en écoutant : Airline to heaven, Billy Bragg and Wilco

Depuis que c'est moi qui ai endossé son costume il y a quelques années lors d'un réveillon en famille, je ne crois plus au Père Noël. Il a toutefois été un personnage important dans l'aboutissement de ma recherche d'emploi (je me demande si mon passage dans son village en Laponie a joué un rôle dans cette histoire). Une librairie a fait appel à moi pour faire face aux hordes de gens attendus durant le rush des Fêtes. Pas n'importe laquelle des librairies s'il vous plaît, mais une des succursales du plus grand réseau de librairies francophones en Amérique du Nord (ce qui est génial avec le Québec, c'est que tout et n'importe quoi peut se qualifier de "plus grand truc francophone d'Amérique du Nord", d'ailleurs, si vous venez me visiter, je pourrais par exemple vous présenter la plus grande communauté d’écureuils francophones d'Amérique du Nord).

C'est là que vous vous dites que ça doit être le paradis (ou alors vous vous demandez si les écureuils montréalais ont l'accent québécois) de travailler dans une librairie, d'être entouré de livres la journée longue, prenant quelques minutes ici ou là pour s'imprégner de quelques lignes de Baudelaire tout en savourant la musique classique qui ne manque pas d'emplir les lieux.

Laissez-moi vous dire qu'il s'agit en réalité d'un emploi dangereux. On risque chaque seconde de finir aux urgences. Car le livre est un objet plein de fourberies. Passons sur les "paper cut" qui transforment vos mains en rayon boucherie. Attardons nous plutôt sur le coup derrière la tête. Lors de mon premier jour, j'ai vu un livre finir sa course à terre. Plein de bonne volonté mais manquant cruellement d'expérience dans ce nouveau métier, je me suis précipité pour le ramasser. Voilà comment j'ai pris tout le reste de la pile sur la tête. Oui oui, c'est vraiment arrivé. Heureusement, personne ne m'a vu.

J'ai eu toutefois de nombreuses autres occasions de passer pour un con. Imaginez ces gens plein d'assurance qui vous interpellent pour savoir si le dernier bouquin de "un nom que tu connais pas et que tu comprends pas" est sorti... Pire, parfois on m'interroge en anglais. Mais bon, au moins, les anglos, ils ne me demandent pas le livre de Zemmour !

Il y a cependant bien plus traumatisant que se balader dans le magasin en "conseillant" les clients. Il y a la caisse. En tant que commis (de répétition), je suis parfois assigné à cette tâche hautement enrichissante. En gros, tu passes tes journées à répéter : "Vous voulez un sac ?" Tellement que j'ai l'impression d'être une hôtesse de l'air dans un avion bourré de désespérés gastriques.

"Vous voulez un sac ?"

Malgré tout, c'est un immense soulagement d'avoir trouvé cet emploi. Je commençais à déprimer sérieusement à force de jeter mon CV par la fenêtre. C'est en tout cas comme cela que je le vivais tellement mes candidatures restaient lettres mortes. Je me sentais comme Mario Bros dans les premières années de sa carrière, quand il pouvait rester des heures contre un mur alors que ses jambes s'activaient sans fin. Puis de toute façon c'était l'heure de fermer la fenêtre, l'hiver arrive. Me voilà prêt à l'affronter dans la plus grande ville francophone d'Amérique du Nord !

Que ton métier ne consiste pas à gagner ta vie, mais à te distraire. Jouis de la terre, ne la possède pas. Par manque d'esprit d'entreprise et de foi, les hommes sont là où ils en sont, ils achètent et ils vendent, ils passent leur vie comme des serfs."

Henry David Thoreau, Walden

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15 octobre 2014 3 15 /10 /octobre /2014 16:13

A lire en écoutant : The times they are a changin', Bob Dylan (générique de Watchmen)

Ben oui, rien que ça. Plus vieux d'un tour de soleil depuis quelques jours, ma conscience politique a profité de l'événement pour se mettre à remuer, face à un constat simple. Depuis quelques années, on sent notre petit pays sombrer dans le cynisme, le fatalisme et la résignation. Et un matin, on se réveille avec un choix que l'on n'a pas envie de faire. Avec François Hollande, l'homme qui gouverne la France les deux pieds sur les freins (du scooter) (ok elle est pourrie, mais c'était trop tentant), Nicolas Sarkozy, qui promène tellement de casseroles qu'on s'attend à le voir dans la prochaine pub Mobalpa, et Marine Le Pen (no comment), le projet que l'on va devoir privilégier dans les prochaines années n'apparaît pas des plus enthousiasmants. Il y a bien quelques partis plus modestes qui gagnent ma sympathie, mais ils sont souvent trop sectaires, s'adressant pour la plupart à seulement une frange de la population. N'est-il plus possible de rassembler le maximum de Français derrière une vision commune, ou au moins ceux qui croient toujours au postulat de départ de notre société : intérêt général > intérêt particulier. Je pense (naïvement ?) que si. Cela commence, à mon sens, par une opération de triturage de cervelle, en laissant le pouvoir à l'imagination. Refusant de bouder devant la pitoyable descente au caniveau de la politique tricolore (je vous rassure, j'en ai bientôt fini avec ce ton solennel), je me suis amusé à imaginer neuf idées qui devraient au moins vous faire sourire, et, peut-être, vous encourager à en développer d'autres !

1) La retraite à 65 ans, pour tout le monde : Un grand coup de balai dans la classe politique française. Hop, une vraie loi sur le cumul des mandats, et plus possible de les empiler en long, en large et en travers. Puis à 65 ans, tu prends ta retraite de député, de maire, de ministre ou whatever, et tu te tires cultiver des tomates avec ta troisième femme. La politique, c'est gérer pour la génération actuelle, mais surtout préparer le terrain pour les suivantes. Merde, j'ai pas envie qu'un gars de 70 ans qui a vu le minitel apparaître quand il en avait déjà 50 décider de comment sera le pays de mes mômes (j'en ai pas encore, raison de plus !).

2) Et si on apprenait l'anglais avec Tom Petty ? Tout le monde est d'accord pour dire que nous sommes les pires en Europe en ce qui concerne l'apprentissage de l'anglais. Bon, alors on brûle tous ces livres bidons inintéressants qu'on a tous eu entre les mains, et on balance Tom Petty and the Heartbreakers dans toutes les classes du pays. Merde, si Madame Barbanton était entrée dans la salle 316 du collège Pierre de Ronsard en envoyant "Learning to fly" à fond, je suis sûr que tous les élèves de la 6e A de l'époque, dont moi-même, se seraient levés pour faire les choeurs. "I'm learning to fly, but I ain't got wings. Coming down is the hardest thing". C'est aussi facile que les méthodes qu'on nous sert mais tellement plus marrant. Fuck, Brian n'a qu'à rester dans la cuisine !

Tom Petty et les briseurs de coeurs
Tom Petty et les briseurs de coeurs

3) On éteint la télé un jour par semaine : Un peu radicale comme mesure, mais cela permettra de garder un peu de temps de cerveau disponible pour des activités plus enrichissantes. Quand on ne pourra plus s'endormir devant "L'amour est dans le pré" ou faire semblant de se cultiver devant le "Grand journal", peut-être qu'on trouvera du temps pour lancer des associations, lire des bouquins, monter des festivals ou écouter du Mozart (Ok, du Tom Petty, ça suffira !).

4) On révolutionne la mi-temps des matchs de football : C'est un moment décisif où l'on peut toucher un paquet de monde. Alors fini les pubs (de) rasoirs et de voitures entre deux buts d'Ibrahimovic ou trois saucisses de Koscielny. Obligation de mettre en avant des événements culturels, des maisons d'éditions ou autre. Mieux, on programme une émission historique ou une chronique géopolitique. Soyons audacieux ! D'autant plus qu'il est impossible qu'une intervention de Bernard Getta soit plus compliqué à comprendre que Franck Ribéry.

5) On se barre tous à 18 ans : Maintenant que notre jeunesse est parfaitement bilingue grâce à des groupes de rock inspirés, on fait tout pour la mettre dehors quelques mois, après le bac. En plus de favoriser l'ouverture d'esprit, ce genre d'aventure permet de réaliser que l'on passe pour des arrogants irrespectueux à peu près partout sur la planète (un exemple : en Australie, le vol à l'étalage est qualifié de "french shopping"). Peut-être que cela leur permettra de ne pas trop prendre le pli (pas sûr cela dit, je dois confesser ici avoir pratiqué des versions améliorées du french shopping à une ou deux reprises en Australie...).

Il paraît que le Français est arrogant.
Il paraît que le Français est arrogant.

6) Les trajets de moins d'un kilomètre en voiture, c'est fini ! Ce n'est pas un secret qu'on est en train de proprement saloper la planète. Pourtant, lorsque j'explique que je me suis rendu quelque part après 20 minutes de marche, on me regarde parfois comme si je venais de manger un cadre de vélo... Mais réfléchissez un instant : où est-ce que vous êtes souvent le plus stressé et apte à insulter tout ce qui vous entoure ? Pour ma part, la voiture est la bonne réponse. Tandis que la marche favorise la réflexion et les circulations (sanguine et automobile).

7) On lit la presse payante bordel ! Déjà, ça me donnera peut-être du travail un jour. Mais surtout, plus on achètera la presse, plus elle sera indépendante, et meilleure elle sera (facile, non ?). Peut-être même qu'un jour, les sites d'informations n'auront plus besoin de "faire du clic". On pourra alors rêver d'un monde où les médias d'informations ne "traiteront" plus des nouvelles du genre "Venezuela : il égorge sa grand-mère en chantant du Britney Spears", "Il trouve un Miel Pops dans sa boîte de Chocapic" ou encore "Nabilla a changé de taille de soutien-gorge".

8) Et si on fêtait notre multiculturalisme : Bon, j'ai banni pas mal de trucs déjà, pas très cool pour quelqu'un qui se voudrait un chantre de la liberté. Alors, pour me rattraper, je propose de faire une méga fête tous les deux ou trois ans. On choisit une ville différente pour chaque édition, où l'on réunit toutes les communautés du pays et leur particularité : ça peut être le fun une semaine à enchaîner les concerts tsiganes, les cours de cuisine portugaise, les séances de ciné africain, les conférences sur l'histoire polonaise ou que sais-je encore. Puis vous n'êtes même pas obligé de participer à tout ça, vous pouvez vous contenter de la buvette. Comme le chante l'excellente Ariane Moffatt, "l'ouverture de l'esprit n'est pas une fracture du crâne..."

Le fameux glassharmonica. Je me demande si ça fait mal.
Le fameux glassharmonica. Je me demande si ça fait mal.

9) Pour finir, un grand concours d'idées anticonformistes ! J'ai lu cet article hilarant il y a quelques jours sur l'honnêteté radicale, un concept un peu dingue mais qui ne manque pas d'intérêt. Et je me disais que ce sont souvent les gens qui entendent "le son d'un autre tambour", comme dirait Thoreau, qui finissent par transformer notre société. Imaginez, s'il n'y avait pas eu Bill Haley et son choquant "Rock around the clock", on serait peut-être encore en train d'attendre Tom Petty. Que dire de Léonard de Vinci ou Benjamin Franklin, qui passait pour un illuminé avec son histoire d'électricité dans les nuages, avant d'inventer le paratonnerre (il faut toutefois concéder qu'il a eu moins de succès avec le glassharmonica, une autre de ses inventions...) Bref (lance-t-il après un post interminable), il est temps de laisser le pouvoir à l'imagination !

He's a real nowhere man
Sitting in his nowhere land
Making all his nowhere plans for nobody
Doesn't have a point of view
knows not where he's going to
Isn't he a bit like you and me?
Nowhere man please listen
You don't know what you're missing
Nowhere man, The world is at your command."

The Beatles, Nowhere Man

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