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6 octobre 2014 1 06 /10 /octobre /2014 19:09

A lire en écoutant : Grand champion international de course, Les Trois Accords

Récupération des dossarts, J-1.

Récupération des dossarts, J-1.

Je me rappelle très bien la première fois que je suis allé courir après mon inscription au marathon de Montréal. C'était au mois d'avril, à Bordeaux. Au bout de 23 mètres, j'ai commencé à sérieusement flipper. Je me sentais déjà épuisé à l'idée de m'entraîner pour faire 42 bornes de course, sachant que je n'avais jamais couru plus d'une heure.

C'est ce moment-là (ainsi qu'aux premiers entraînements laborieux sur un chemin de halage à Mont-de-Marsan) qui m'est revenu en mémoire quand j'ai franchi la ligne, après 3h50 à faire claquer mes talons sur le bitume. Puis j'ai posé mes mains sur ma tête, avant de sentir mes glandes lacrymales tenter de se mettre en marche (la chaleur ayant privé mon corps de la moindre goute d'eau, j'ai ainsi pu éviter l'humiliation de fondre en larmes sous les objectifs des photographes de l'organisation). Non seulement j'avais atteint mes objectifs, à savoir finir en moins de 4 heures sans marcher une seule fois, mais en plus je m'étais amusé comme un gosse pendant (quasiment) toute la course. Extraits.

Synchronisation des montres à quelques secondes du départ (Laurent, tu devrais te concentrer un peu !).

Synchronisation des montres à quelques secondes du départ (Laurent, tu devrais te concentrer un peu !).

Km 0. Tout était réuni pour que la journée soit belle. Un soleil radieux, des copains anxieux, un décor délicieux et une ambiance de feu. Mais aussi un gel énergétique factieux. En effet, 200 mètres après le départ, l'un des deux gels que j'avais accrochés à ma ceinture a décidé qu'il en avait vu assez. Désorienté par sa perte, je me retournais pour le récupérer. Mauvaise idée. Environ 10000 personnes me fonçaient littéralement dessus, l'une d'elles courant inévitablement sur mon gel à la mandarine. Je me tournais vers Laurent, un ami qui participait aussi à son premier marathon. Un ami comme on n'en compte peu autour de soi, et qui sait toujours trouver les mots dans les moments difficile : "Bah, te reste plus qu'un gel, mais 42 km..."

Km 9. Je me sens bien. Surtout que je me permets de doubler, que dis-je, de laisser sur place un jeune retraité de la NHL (la ligue nord-américaine de hockey), qui a gagné des millions dans sa carrière, notamment à Montréal. Il faut dire qu'il pèse dans les 150 kilos. Georges Laraque, c'est son nom, finira en 6h10, bien loin derrière moi (ne boudons pas notre plaisir).

Km 15. C'est plutôt une bonne idée. Tout le long du parcours, comme cela se fait dans de nombreux marathons, des groupes de rock sont là pour aider tout un chacun à se surpasser. Ou pas. Deux fois, j'ai couru au son de la chanson "Highway to hell". Avouez qu'il y a mieux lorsqu'on est dans les tous premiers instants d'un marathon, où la température avoisine les 30 degrés.

Km 19. "Tout ça pour une banane". Le public, survolté pour pousser les petits flemmards du semi-marathon qui touchaient au but, rivalisait d'imagination avec des pancartes plutôt bien senties. Pendant 2 km, c'était un peu la folie, les gens criaient, et moi, je levais les mains pour haranguer la foule. J'étais bien, réglé comme un coucou, sur mes temps de passages griffonnés dans la paume de ma main gauche, pour finir en 3h45.

Km 25. Les premières pensées négatives commencent à faire des petites incursions dans ma tête. "J'ai le genou qui commence à couiner, j'ai soif..." Un coureur allongé sur le trottoir, un linge humide sur le front et entouré de quelques soigneurs, ne fait rien pour me rassurer. D'autant plus qu'il y a moins de monde, et les "Sébastien, t'es capable !" (pratique le nom sur le dossard) d'illustres inconnus se font rare. Et cette pancarte, clouée à un érable, avec personne autour : "N'oublie pas que t'as payé pour être ici ! lol". Dur. Mais je suis toujours content d'être là, je suis dans les temps, tout va bien.

Km 30. Les jambes sont toujours sur le même rythme, mais la tête commence à vaciller légèrement. Comme j'avais déjà utilisé le joker "aide du public", seul "l'appel à un ami" pouvait me sauver. La chance était de mon côté, c'est le moment qu'a choisi Pauline, une amie française, pour me repérer. En tenue, elle m'a accompagné pendant presque 10 km. On a discuté un peu (enfin, surtout elle) mais son soutien précieux m'a permis de repousser encore un peu plus les limites. Les seuls mots que je prononçais, entre le 35e et le 39e, étant : "ça commence à devenir dur..."

Km 39. Les quelques verres de vin blanc qu'elle avait bus la veille ont eu raison de Pauline, qui finissait alors sa mission. J'accélérais un peu après le dernier ravitaillement, dans cette interminable ligne droite qui menait au 41e km. En fait, j'accélérais 200 mètres puis je craquais petit à petit. Plus possible de tenir le 3h45...

Km 42. Dans la dernière ligne droite menant à l'arrivée, au parc Lafontaine, les spectateurs partageaient nos souffrances. Mais le sourire était de retour sur mon visage, j'avais même la force de relancer, puis de sprinter dans les 150 derniers mètres. Le speaker annonçait mon nom, le public hurlait, je levais les bras, savourant ces derniers instants, avec l'impression de décrocher une médaille olympique. On a beau n'être qu'un anonyme au milieu des 4600 autres marathoniens, on se sent à ce moment là comme le héros du jour.

A l'arrivée au parc Lafontaine, frais comme des gardons.

A l'arrivée au parc Lafontaine, frais comme des gardons.

Merci à Marc et Laurent, dont je tairais les temps par respect pour leurs efforts, d'avoir traverser l'Atlantique pour vivre tout cela avec moi. On n'a pas gagné des millions, mais on a tous fini. J'ai déjà hâte à notre prochaine idée à la con !

Je ne peux pas acheter de ce poulet, il me faut des produits bio."

Laurent Z, nouvelle version, quelques jours avant la course

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20 septembre 2014 6 20 /09 /septembre /2014 18:27
Ma chambre en mode immigré clandestin.
Ma chambre en mode immigré clandestin.

A lire en écoutant : Bon Yeu, Les Colocs

Il n'y a pas que notre ancien président qui est sur le retour. Après environ trois mois loin des joies du monde du travail, me voilà à nouveau sur le marché. Je précise d'ores et déjà que je ne brigue pas la présidence de l'UMP, même si j'avoue prendre parfois un peu de plaisir à me moquer du monde.

Après quelques jours à dormir par terre en mode clandestin fin août, craignant à tout moment une arrivée impromptue des services d'immigration, me voilà confortablement installé dans ma chambre de la rue Saint-Dominique, dans la Petite Italie (ouais, je sais, faire 8000 bornes pour vivre au milieu de restos italiens...). C'est le pied, sauf que je ne peux plus prétexter que je n'ai pas de bureau pour chercher correctement une activité rémunérée.

Heureusement pour ma santé mentale, je ne cours pas seulement après un travail. En pleine préparation pour mon premier marathon, dimanche 28 septembre à Montréal avec deux amis dont on ne sait pas encore s'ils s'aligneront dans la catégorie classique ou handisport (des petites natures), cela fait longtemps que je ne me suis pas senti aussi en forme (pour la première fois depuis des années, je pense avoir bu moins de bières que d'autres breuvages sur les deux derniers mois). Une chance, puisqu'un terrain de basket se trouve quasiment aussi près de ma chambre que le frigo.

Bien décidé à ne pas gaspiller tout ce temps libre qui me tombe dessus depuis le début du mois, j'enchaîne également les aller-retour à la bibliothèque afin de me cultiver pour gagner enfin un jour une partie de Trivial Poursuit contre ce bon Laurent (qui est l'un des joyeux drilles qui tentera de me suivre sur les routes du marathon). J'ai aussi pris l'initiative de bosser mon anglais grâce à une site Internet gratuit. Ce qui peut donner vie à des scènes assez loufoques. "My mother is in the kitchen", m'entends-je énoncer à mon ordinateur, ou encore "My sister has a pink dress" (oui ça fait un peu vieux jeu comme ça, mais c'est plutôt bien fait). On l'aura compris, je suis encore loin de gagner une partie de Trivial Poursuit dans la langue de Stephen Harper (c'est le premier ministre canadien, je vous instruis un peu car son charisme d'huître morte empêche sa réputation de traverser l'Atlantique).

Et, c'est promis, si je n'ai toujours pas de boulot à la mi-octobre, je me remets à l'harmonica. Une annonce, je le sais, très attendue par certains d'entre-vous. En tout cas plus que le retour de Nicolas !

Je parcourais les rues au milieu de la poussière tourbillonnante en me demandant ce qui m'attendait, où j'allais, qu'est-ce que j'allais faire. Toute ma vie devint un grand point d'interrogation. Et j'étais la seule personne au monde qui pût y répondre. J'allai à la bibliothèque municipale et piochai dans les livres. Je les ramenais à la maison par douzaines et par brassées, sur tous les sujets, peu importait lesquels. Je voulais étudier de tout un peu et en retirer quelque chose, quelque chose qui ferait de moi une sorte d'être humain : libre de travailler pour moi-même, et libre de travailler pour tout le monde."

Woody Guthrie, En route pour la gloire (Bound for glory)

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25 août 2014 1 25 /08 /août /2014 22:12

A lire en écoutant : Cum on feel the noize, Quiet riot

"Il n'y a pas un enfant qui va mourir" si les écoles achètent moins de livres, a récemment lancé le ministre de l'Education du Québec, Yves Bolduc. Un moyen de justifier des coupes dans le budget qui a provoqué un vif débat ici. Hier soir, une intervenante dont j'ai oublié le nom dans un talk-show, a souligné que si personne n'allait mourir, certains ne pourraient pas être sauvés par la lecture.

Bon, je ne crois pas avoir besoin d'être sauvé de quelque chose, mais il y a indéniablement des livres qui contribuent à changer nos vies. La mienne, en tout cas, c'est certain ! J'ai déjà évoqué tout cela dans un précédent article, mais je ne résiste pas à l'envie, que dis-je, à la mission, de vous mettre sur la piste de l'auteur le plus génial, le plus incisif, le plus déjanté, le plus intéressant, le plus drôle, le plus éclairant (oui oui, tout cela à la fois, et j'en passe) qu'il m'a été donné de lire.

Il était inconnu, ou pas loin, il y a de cela quelques mois en France, mais la toujours pertinente maison d'édition Gallmeister a réédité ses oeuvres pour notre plus grande chance. Aux Etats-Unis, en revanche, il fait presque figure de gourou pour certains depuis des décennies. Il est tellement populaire que Gus Van Sant a adapté dans les années 90 l'un de ses bouquins, "Even cowgirls get the blues" (Même les cowgirls ont du vague à l'âme). Bon, je vois venir d'ici les quelques fainéants, qui prennent tout de même le temps de me lire, qui se disent que mater un petit film sera un bon moyen de découvrir l'animal. Grosse erreur, selon moi. Même s'il a avoué avoir bien ri pendant le tournage, Robbins lui-même n'est pas fan du film. Et surtout, vouloir condenser son livre en moins de 2 heures, c'est comme essayer de faire rentrer l'océan Pacifique dans un biberon. Totalement vain.

Pourquoi ? Parce que Robbins a une écriture tellement riche et jouissive qu'on ne pourrait mettre que 10 pages dans un film d'une heure et demi. J'en vois d'autres faire la mou, imaginant des pages remplies de détails soporifiques. Non. J'adore lire, mais rien ne me rebute plus que les écrivains qui mettent cinq pages à décrire le nez et le chapeau d'un personnage secondaire. Tom Robbins ne s'interdit pas les descriptions, mais son sens ahurissant de la métaphore va vous donner des crampes partout si ne vous vous étirez pas après chacune de vos sessions lectures.

MN-AG887_ROBBIN_FR_20140819110525.jpgAlors oui, Robbins est un allumé qui a pas mal tourné aux drogues psychédéliques (comme vous pouvez l'apprendre dans cette excellente interview où il compare astucieusement Jésus à un hot-dog), mais cela ne l'empêche pas d'avoir un regard éclairant sur le monde qui l'entoure, et qui, personnellement, m'aide un peu à mener ma barque. J'étais un peu dans les cordes à mon arrivée ici, mais la venue de Marc, un ami d'enfance, et notre périple à travers le Québec, m'a redonné la pêche. Après l'avoir déposé à l'aéroport, j'ai débuté mon troisième livre de ce bon vieux Tom, et ça a fini de me rendre totalement zen.

Difficile de vous en dire plus, mais une dernière précision s'impose : quand on ouvre un de ces bouquins pour la première fois, on tangue un peu, car cela ne ressemble en rien à ce que vous avez pu lire auparavant. Mais une fois qu'on maîtrise un peu la bête, c'est l'extase !

PS : Ce matin, en me levant, j'ai appris que le gouvernement français avait démissionné. J'ai trouvé ça presque drôle de lire les réactions, de voir tous ces pantins s'agiter pour leur carrière, réussissant simplement à brasser du vent et à produire une légère brise qui n'atteindra jamais le coeur et les tripes des gens. Et tout ce cinéma m'a fait penser à un passage d'un livre de Robbins :"Je crois aux solutions politiques pour les problèmes politiques. Mais les problèmes fondamentaux de l'homme ne sont pas politiques, ils sont philosophiques. Tant que les humains n'auront pas résolu leurs problèmes philosophiques, ils sont condamnés à résoudre sans fin des problèmes politiques. C'est une cruelle et fastidieuse répétition." On n'est pas dans la merde, hein ? En attendant, on peut toujours filer à la librairie pour acheter ses oeuvres complètes !

 La citation du jour : "Devenir adulte est un piège, coupa le docteur Robbins. Quand on vous dit de la fermer, on veut que vous arrêtiez de parler. Quand on vous dit de grandir, on veut que vous cessiez de grandir. Atteignez un bon petit niveau moyen et restez-y, prévisible et inamovible, plus du tout menaçant. Si Sissy est immature, cela signifie qu'elle grandit encore ; si elle grandit encore, cela signifie qu'elle est encore en vie. En vie dans une culture à l'agonie." 

Tom Robbins, Même les cowgirls ont du vague à l'âme (Even cowgirls get the blues)

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8 août 2014 5 08 /08 /août /2014 17:41

A lire en écoutant : All the roadrunning, Mark Knopfler et Emmylou Harris

P1040054.JPG

 

Depuis mardi, aux alentours de 19 heures, me voilà résident permanent au Canada. Après deux ans et demi de paperasse à la con, la dernière étape fut un passage rapide devant un agent de l'immigration. Puis tout était bouclé. J'avais envie de sortir sur le parvis de l'aéroport, extirper de mes poches un paquet de cigarettes, en allumer une en toisant la ville puis prendre une première bouffée les yeux fermés, avant de les rouvrir et chuchotter "je suis de retour".


Mais je ne fume pas, alors je me suis contenté de monter dans le bus. Les heures qui ont suivi ont été plutôt étranges. Retourné par l'émotion, j'avais l'impression d'être un flamby qu'on aurait trop vite démoulé. Ou, pour être plus précis, je me sentais comme Marty McFly qui aurait cassé la pompe à eau de la DeLorean en plein voyage dans le temps. Revenir près de cinq plus tard dans un lieu où l'on a vécu pendant deux ans, c'est une drôle de sensation. Un peu comme quelqu'un qui réapprend à marcher après un accident. Y a tout un tas de chose qui faisait partie de ton quotidien, que tu faisais ou que tu voyais chaque jour, que tu maitrisais parfaitement, qui désormais te demande un effort, comme jeter un oeil au plan du métro pour s'assurer d'aller dans la bonne direction. Il y a cinq ans, je me sentais vraiment chez moi ici, et maintenant je me sens comme un Français de plus.


Mais le plus difficile, c'est de ne pas se laisser aller à la nostalgie. Pour moi c'est très dur, je suis un éternel nostalgique même si ça me sert tellement le coeur qu'on pourrait le faire rentrer dans la boîte cranienne d'un écureuil du parc Lafontaine (c'est sûrement pas réciproque, mais ils m'avaient manqué ces petits crisses !). A chaque coin de rue des souvenirs remontent et j'ai parfois la sensation d'être un peu perdu dans un univers parallèle.


Heureusement, je n'ai pas trop le loisir de me laisser porter par toutes ces questions. Parce qu'avoir enfin sa résidente permanente, ça te donne juste le droit de te lancer dans un nouveau tunnel de paperasse à la con. L'assurance-maladie, la banque, le numéro d'assurance sociale et quelques établissements de nuit m'attendaient sagement ici. C'est plutôt bien avancé, et la prochaine mission sera de trouver un bon petit travail et un logement. Mais pour l'instant je vais chercher un doliprane, ma première sortie nocturne en ville a laissé des traces !  

 

PS : Vous trouvez pas que l'air de Montréal me rajeunit ? Bon, ok, cette photo est une escroquerie géante. Comme je n'ai pas encore d'appareil, j'ai mis une photo vieille de six ans...
PS2 : J'avais dit à certain d'entre vous que mon téléphone français était encore actif, mais en fait il s'est pas trop adapté au Canada donc pas la peine de m'envoyer des messages, je ne les aurais pas !

 

La citation du jour : "Après que cinq ou six kilomètres me soient passés sous les pieds, une grosse Lincoln Zephyr dernier modèle s'arrêta, et je montai sur le siège arrière. Je vis deux personnes sur le siège avant. Ils me posèrent quelques questions idiotes. Je veux dire, c'étaient de bonnes questions, mais je n'y apportai que des réponses idiotes. Pourquoi étais-je dehors sur les routes à une heure pareille ? J'étais là, simplement. Où allais-je ? J'allais en Californie. Quoi faire ? Oh ! voir si je ne pouvais pas faire un peu mieux." 

Woody Guthrie, En route pour la gloire (Bound for glory)

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10 juillet 2014 4 10 /07 /juillet /2014 19:21

A lire en écoutant : Ball and chain, Social distortion

P1280707.JPGJ'ai même perdu aux parties de dés.  Merde, trouvez-moi un truc qui dépend plus du facteur chance qu'une putain de partie de dés ! Mais bon, la chance, ça fait bien longtemps que j'ai appris à faire sans. Je suis du genre à tomber en panne à 100 bornes de chez moi alors que je viens de faire 9000 km tranquille, ou encore être le seul gars à qui on apporte le mauvais plat au restaurant sur une table de quinze...

Bref, en manque de chance, je ne suis pas un débutant. Mais je ne désespère pas d'atteindre un jour le quota maximum, et c'est avec cet espoir fou que je suis parti fin juin randonner dans les Pyrénées avec mon vieux compagnon de route Yoann. On avait tout ce qu'il fallait pour être heureux : cinq jours devant nous dans les Pyrénées ariégoises, quelques boîtes de thon, une tente, une carte, quelques caleçons et de précieuses indications à propos d'une boucle sympa qui devait nous amener notamment du côté espagnol.

Nous étions d'ailleurs à quelques mètres de la frontière, le deuxième jour aux alentours de midi. Mais ces fourbes d'Espagnols avaient visiblement décidé qu'ils ne voulaient pas de nous dans leur foutu pays. Pour atteindre le col qui devait nous faire basculer chez Cervantès, le chemin empruntait une énorme plaque de neige, à pic, bien sûr. A peu près aussi équipés qu'un couple de retraités au club Med de Marrakech, nous n'avons écouté que notre bon sens et fait demi tour. Mais à peine 24 heures après le départ, c'était quand même un peu la loose. Alors nous sommes redescendu dans la vallée, avec nos sacs d'une bonne douzaine de kilos sur le dos, et notre nouvel ami pour le reste de la journée : la pluie.

P1280690.JPGLe moral dans les chaussettes (trempées), les épaules au niveau du bassin, la jauge d'énergie aussi pleine que le carnet de bal d'un tétraplégique, je tenais debout seulement grâce à mon compagnon, volontaire et bien décidé à ne pas jeter l'éponge aussi vite. En un coup d'oeil sur la carte, il avait repéré un autre col qui pouvait nous ramener sur notre boucle sans trop perdre de temps. C'est comme cela qu'on s'est retrouvé à 18 heures à 2300 mètres, sous la pluie, entourés de neige, avec une visibilité qui nous offrait tout juste le luxe de voir le bout de nos chaussures, sans avoir croisé personne depuis des heures.

Puis, la peur de ma vie, qui surclasse largement ma chute néozélandaise. Cela faisait quelques minutes que j'avais laissé partir Yoann devant, pour retrouver le chemin, perdu pour la 82e fois de la journée. Il avait disparu derrière une petite crête enneigée. Comme je lui avais dit d'aller voir "30 mètres plus loin", je commençais à trouver le temps long. J'ai appelé. Rien. Je me suis approché. Rien. J'ai crié. Rien. J'ai dépassé la crête, ne voyant toujours pas à plus de cinq mètres. J'ai hurlé et je me suis mis à sérieusement flipper, avec l'impression d'être dans un mauvais film. Je me voyais déjà annoncer à sa mère que je l'avais perdu et que je récupèrerais bien sa Playstation 3. Ce con a fini par apparaître de je-ne-sais-où, m'assurant qu'il n'y avait "rien de dangereux dans le coin". Idiot. Je crois que je me suis fait dessus comme jamais (excepté une petite tourista en Afrique quand j'avais 15 ans, mais impossible de raconter ça ici).

Donc, je disais, nous avions tout pour être heureux : les Pyrénées ariègoises (que l'on n'a pas vu la plupart du temps alors qu'on était en plein dedans), une tente (qui a failli s'envoler la première nuit vu son âge avancé), une carte (qui datait, comme on l'a vu le dernier jour, de 1993) et quelques caleçons (trempés dans le sac, comme tout le reste de nos affaires). Reste le thon. Qui, lui, ne m'a jamais trahi. Mais vous conviendrez que c'est un peu juste pour le bonheur.

Heureusement, cette journée cauchemardesque s'est terminée par un de ces moments "strip-tease", du nom de la fameuse émission belge. Ces moments où vous vous demandez ce que vous faites là tellement ils sont improbables. A l'heure de l'apéro, ce mardi-là, nous étions donc en train de siroter quelques pastis chez un jeune berger trop heureux de voir du monde (je pense que si on lui refusait l'apéro, il nous découpait à la hache avant de nous filer à bouffer à ses moutons), pendant que nos affaires séchaient devant sa cheminée providentielle. En notre compagnie, deux retraités qui gambadaient depuis trois semaines sur le GR10. Après trois verres, ils ont fini par goûter au petit joint préparer par notre ami berger, se prenant chacun en photo avec à l'aide de leur iPhone, promettant d'envoyer la photo à leur femme...

P1280705.JPGSur cinq jours, au final, on a vu peut-être un bout de montagne, une fois, environ cinq secondes. On a même cherché pendant plus d'une heure, le dernier soir, une cabane pour passer la nuit qui était à 100 mètres. Pourtant, malgré mes défaites aux dés, c'était quand même sympa de partager toutes ces galères avec cet idiot de Yoann !

PS : La vie va reprendre dans le coin, je décolle pour Montréal le 5 août ! Et je compte sur vous pour faire décoller un peu la fréquentation du blog !

 La citation du jour : " Mais les projets sont une chose et le destin une autre. Lorsqu'ils coïncident, c'est le succès. Mais il ne faut pas tenir le succès pour un absolu. On peut d'ailleurs se demander si le succès est une réaction adéquate à la vie. Le succès élimine autant d'options que l'échec." 

Tom Robbins, Même les cowgirls ont du vague à l'âme (Even cowgirls get the blues)

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30 octobre 2013 3 30 /10 /octobre /2013 13:30

A lire en écoutant : Slow and steady, Of monsters and men

J'ai attendu plus d'un mois et demi. Alors que je pensais verser dans l'hystérie, j'ai appris avec beaucoup de retenue la bonne nouvelle. Je me suis presque surpris moi-même de ne pas m'être jeté sur le blog pour écrire un article clignotant de mille feux.

Depuis le 11 septembre dernier, je suis donc titulaire d'un visa de résident permanent au Canada. Deux ans et demi après les premières démarches, c'est enfin le bout d'un chemin qui aura été tout sauf tranquille. Mais, l'âge peut-être, le soulagement l'a emporté sur l'envie de sauter partout.

Si extérieurement rien n'a changé depuis ce jour béni, je peux vous dire qu'à l'intérieur ça bouillonne. Plus un jour ne s'achève sans que j'ai pensé au moins une petite minute à ma future vie en Amérique de Nord, aux amis que je vais revoir, aux lieux qui me manquent tellement à Montréal, aux habitudes du quotidien que j'avais laissé là-bas, et surtout à l'énorme voyage que je vais m'envoyer aux Etats-Unis.

1376994_10200850774770010_253560534_n.jpgL'idée de base était d'aller vivre quelques temps dans le Yukon, dans le nord-ouest du Canada, avant de prendre mon baluchon et de me diriger vers les USA. Mais j'attends trop ce voyage pour le repousser plus longtemps. Ces dernières années, j'ai découvert trop d'auteurs, d'artistes, de paysages et d'histoires sur ce pays pour faire durer le plaisir davantage. 

En juillet prochain, je prendrais donc la route (enfin l'avion plutôt) de Montréal. Je m'attarderai le temps de savourer ces retrouvailles pendant quelques mois, puis au printemps 2015, je ferai l'acquisition d'une vieille Buick (ou au moins un truc qui roule) pour partir vagabonder six mois aux Etats-Unis, sur les traces de H. D. Thoreau, Bruce Springsteen, Bill Bryson, Woody Guthrie, Doug Peackok et évidemment les fantastiques William Clark et Meriwether Lewis. 

Il me reste donc un an et demi pour préparer cette escapade qui doit toujours m'emmener, ne l'oublions pas, devant une savoureuse bière à L.A... Après, il sera sérieusement temps de penser au Yukon et à ses aurores boréales ! 

 La citation du jour : "La fuite est le nom que les gens ensablés dans les fondrières de l'habitude donne à l'élan vital." 

Sylvain Tesson, Dans les forêts de Sibérie

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9 septembre 2013 1 09 /09 /septembre /2013 17:23

A lire en écoutant : Jersey, Granville

On s'est lamentablement ramassé. Notre rêve est tombé à l'eau quelques heures après notre retour à Paris. Déambulant sur le net, nous avons alors appris que le point le plus au Nord de l'Europe occidentale est le Cap Nordkinn. Accessible depuis un sentier de quelques kilomètres qui démarre sur la route menant au Cap Nord, nous ne le verrons peut-être jamais. C'est aussi ça, être un gland voyageur et partir dans la précipitation, avec un véhicule douteux et pas le moindre guide de voyage. 

P1030563.JPGMais dans le fond, j'espère que vous serez d'accord (sinon ce n'est pas grave on aura juste l'air encore un peu plus timbrés !), tout cela n'est que symbolique. L'important, c'est tous les moments qu'on a gravés dans nos mémoires jusqu'à ce qu'Alzheimer nous rattrape. Des choses simples, comme un feu au bord d'un lac lapon, des douches en pleine nature dans des décors de rêve, des fous rires en croisant le sosie de Jackie Sardou ou de vieux copains de fac, la dernière gorgée d'Arctic Beer, cette bière que l'on ne trouve qu'au-delà du cercle polaire... Et ce périple, c'était évidemment la sensation d'être libre de tourner à droite, ou à gauche, de s'arrêter, de continuer, de crier, de courir, de sauter, de dormir, de se taire, d'écouter... 

Pour tout cela, on ne pouvait espérer meilleur cadre que la Norvège. Nous ne savions rien, ou presque, de ce pays en partant. Au gré de quelques recherches pendant le voyage, mais aussi de rencontres, nous sommes partis à la découverte de différents lieux de ce territoire somptueux. Alors oui, comme je l'ai entendu des tonnes de fois, c'est cher (nous en avons eu une preuve irréfutable à Tromso, la ville de plus de 50000 habitants la plus nordique du monde, où deux pizzas et deux pintes nous ont coûtés dans les 80 euros...). Je disais donc, c'est cher. Oui, mais c'est beau ! Impossible de se lasser du paysage offert par les îles Lofoten, où les montagnes et la mer s'arrachent tour à tour la vedette sous vos yeux. Avec des airs de bout du monde et un ciel souvent pas très loin au-dessus de votre tête...

P1030465.JPGLes routes de montagne du centre du pays, notamment la 55, envoient aussi du pâté, comme le disait si poétiquement mon acolyte. Il faut noter également qu'on était plutôt fier d'avoir amené notre van à plus de 2000 mètres d'altitude. Avec, en plus, notre autocollant NordKapp et notre plaque girondine, je peux vous dire qu'on bombait le torse ! Voir Knut (c'est désormais le nom officiel du véhicule), au milieu des glaciers, c'était jouissif !

P1030825.JPGMais le plus surprenant en Norvège, c'est cette impression qu'il n'y a rien à jeter. Vous pensez prendre la route entre deux points d'intêret, et au final vous ne pouvez pas faire 100 mètres sans vous arrêter pour savourer ce qui vous entoure. Montagnes, fjords, plateaux désertiques, forêts, rennes en pagaille, cascades... ça ne s'arrête jamais ! J'ai même tellement été subjugé par la beauté d'un parking d'Oslo que j'ai empallé par inadvertance le van dans une glissière... 

Après un dernier stop touristique à Amsterdam et 9000 km de route en trois semaines, un nouveau défi s'offre déjà à nous : se réadapter à la vie en société !

 La citation du jour : "Regarde garçon, on dirait un décor de Dragon Ball Z !" 

Marco, dans les îles Lofoten

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25 août 2013 7 25 /08 /août /2013 11:34

A lire en écoutant : Against the law, Billy Bragg and Wilco

P1030120.JPGDimanche 18 août, 13h50. Nous partons de Paris plein d'espoirs, mais un bruit de claquement régulier vient déjà se mêler à la fête, alors que nous n'avons même pas atteint le périph'. On s'arrête, on ausculte le véhicule, on réfléchit. Ouf, ce n'était qu'un caillou coincé dans la rainure d'un pneu. Pas de mal, mais cinq minutes de perdu. Elles s'avèreront fatales...

Cependant, une semaine plus tard, nous nous sommes réveillés au Cap Nord, après pas loin de 4000 km à travers l'Europe. Passée la monotonie des autoroutes françaises, belges puis allemandes, le périple a réellement débuté lundi soir, à Puttgarden, en Allemagne. C'est là que nous avons embarqué sur un traversier, direction le Danemark. Sur ce bateau, nous étions comme un footballeur pro devant son premier sudoku. Intrigués mais prêts à relever le défi. C'est à ce moment là que j'ai réalisé qu'on allait peut-être réussir notre pari.

P1030081.JPGLa suite, ce fut beaucoup de route mais également des douches sous un jerrican, des nuits pliés en deux (nous n'avons pu régler notre problème de couchette, ce qui nous oblige à dormir dans le sens de la largeur, sachant que le mètre 58 de Marco n'y tient même pas...) et bien sûr des découvertes. Des bonnes, comme la douceur de vivre de Copenhague, les autoroutes gratuites, les forêts de pins égayées par des miliers de lacs (pas sans rappeler ce bon vieux Canada !), les rennes et leurs superbes bois ou encore les températures clémentes jusqu'à l'extrême nord de la Suède. Et des moins sympas, à l'instar du côté flippant des cités finlandaises, de l'escroquerie totale du village du Père Noël en Laponie (oui, nous sommes de grands enfants), et surtout les bières suédoises qui ne dépassent jamais les 3,5 degrés d'alcool quelle que soit la marque...

Nous avons toutefois surmonté ces terribles épreuves. Et aujourd'hui, j'écris ce petit billet depuis le bout de l'Europe. Oui, il y a internet ici. Un restaurant aussi. Et même des voitures de course apparemment sur place dans le cadre d'un tournage. De quoi briser un peu le rêve... On m'avait d'ailleurs soufflé que le Cap Nord, ce n'était que "des touristes et des moustiques". C'est oublier les 200 derniers kilomètres avant d'arriver, à savoir l'une des plus belles routes sur laquelle j'ai conduit.

P1030073.JPGUn seul regret, les cinq minutes perdues à Paris. A Honningsvag, une ville à 30 km du but que nous avions coché afin de nous ravitailler en bières fraiches, une grosse désillusion nous attendait. Alors qu'on s'apprêtait à choisir nos breuvages, un couple nous a indiqués qu'il n'était plus possible d'acheter d'alcool en Norvège après 18 heures le samedi. Il était 18h04...


La citation du jour : "Ce jour-là, j'ai bien cru tenir quelque chose et que ma vie s'en trouverait changée.
Mais rien de cette nature n'est définitivement acquis. Comme une eau, le monde vous traverse et pour un temps vous prête ses couleurs. Puis se retire, et vous replace devant ce vide qu'on porte en soi, devant cette espèce d'insuffisance centre de l'âme qu'il faut bien apprendre à côtoyer, à combattre, et qui, paradoxalement, est peut-être notre moteur le plus sûr
.

Nicolas Bouvier, L'usage du monde

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14 août 2013 3 14 /08 /août /2013 14:00

A lire en écoutant : Speed, Bran Van 3000

 

P1020729.JPGNotre cote a grimpé quelque peu depuis mon dernier billet. Marco et moi sommes désormais propriétaires d'un Volkswagen Transporter de 1994, avec 450 000 kilomètres à son actif. Notre confort sera assuré par sa couchette double, quelques rangements, un frigo et une moquette multicolore qui va certainement nous faire passer pour des hippies gays gobbeurs de LSD...

Mais tout cela importe peu, l'essentiel étant que la machine tienne jusqu'au Cap Nord, puis parvienne à nous ramener sans trop de mal dans notre beau pays. Ou pas. En fait, la priorité, c'est surtout de vivre une de ces expériences qui t'arrachent à la réalité quelques instants lorsque tu y songes à nouveau des années plus tard. Et on a tout fait pour que le voyage soit en tout point inoubliable. Pour cela, nous nous assurons depuis des années d'être absolument nazes en mécanique, et même un peu idiots. Tellement que lorsqu'on a rempli pour la première fois le réservoir avec du gasoil, on a eu 5 minutes de stress en se disant qu'on s'était peut-être trompés.

P1020731.JPGNotre entousiasme balayant notre modeste sens des réalités, nous avons également homis quelques vérifications lors de l'achat. Plus tard, c'est armés de notre légendaire naïveté que nous avons découvert que la couchette ne se dépliait pas vraiment, et que la jauge de température ne fonctionnait pas... Et le van nous réserve sans aucun doute encore quelques surprises pour le début du voyage. Finalement, notre cote n'a peut-être pas augmenté concernant nos chances de boucler ce périple. On a laissé trop de choses au hasard.

Mais c'est peut-être notre salut. Le hasard, parfois, transforme les cauchemars en moments de pur bonheur, où les routes ennuyeuses en cour des miracles. Ouais. Comme quand tu te gèles, trempé, au bord d'une route après deux heures de stop et qu'un vieux bonhomme t'accueille chez lui et t'offre une douche, une pizza et un verre de vin. Ou quand tu croises un Japonais en plein milieu de l'Australie en train de pédaler pour perdre du poids en faisant le tour du pays, par des températures infernales. Des exemples comme ça, on en a déjà des tonnes. Si on fait un peu confiance au hasard, on en aura une nouvelle fournée en rentrant, qu'on ait vu le Cap Nord ou non.

Le départ est programmé dimanche, avec une première étape qui devrait nous emmener de Paris aux environs de Dortmund, en Allemagne. Si la mécanique tient, nous aurons atteint notre objectif le dimanche 25 août. J'espère pouvoir alimenter un peu le blog pendant le voyage, mais rien n'est moins sûr. Cela ne doit toutefois pas vous empêcher de croiser les doigts pour nous, les "glands" voyageurs, comme nous a déjà surnommés mon compagnon de route !


La citation du jour : "Pour garder la forme, j'ouvre à coups de sécateur des chemins dans la broussaille qui s'élève à hauteur d'homme ; je cours dans la toundra en traînant derrière moi une paire de pneus de 4 x 4 ; j'escalade les montagnes environnantes, poussé par la question qui fait voyager les hommes depuis la nuit des temps : qu'est-ce qu'il y a derrière ? Mais derrière, il n'y a rien. Le "rien" absolu sur des millions de kilomètres carrés. De la toundra, des reliefs secs ou neigeux, des lacs bleu acier... et pas une route, ou presque, dans ce pays où voyageurs et fret ne se transportent qu'en avion. Je croise un orignal, cet équidé géant qu'on rencontre dans le Grand Nord ; un ours kodiak vient parfois renifler aux abords de ma cabane ; le silence est si profond que j'entends battre mon propre coeur." 

Mike Horn, Conquérant de l'impossible

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15 juillet 2013 1 15 /07 /juillet /2013 19:51

A lire en écoutant : It's time, The 49 Americans

 

Cette fois, c'est fini. Finis les remplissages de formulaires interminables, finies les séances photos d'identité, finis les tests de français, finis les envois postaux de toutes ces conneries. Je viens de franchir la dernière étape de ma demande de visa pour le Canada, à savoir une visite médicale agrémentée d'une radio et d'une prise de sang. Maintenant, je n'ai plus qu'à attendre. Attendre une belle lettre avec la "brune" comme on l'appelle, à savoir ma résidence permanente. Bon, si les formalités réjouissantes sont derrière moi, il reste toutefois encore un peu de stress et de suspense, ce document pouvant arriver dans 3 mois comme dans 25...

Le problème, c'est que ça fait maintenant plus d'un an que je suis rentré de l'hémisphère Sud, et l'envie de prendre mon sac à dos commence à être oppressante. Il a donc suffit d'une discussion avec un copain légèrement inconséquent pour me convaincre d'aller voir un peu du pays au lieu de jouer au journaliste précaire durant une partie de l'été.

Un jour, le projet de faire le tour du Portugal à vélo en plein mois d'août, et en à peine 2 semaines, est sorti du cerveau malade de ce copain en question. Avec quelques amis, on a essayé de le recadrer. Il a abandonné l'idée mais la seconde d'après il voulait devenir prof de plongée en Australie... A force d'entendre ce genre de truc, faut croire qu'il m'a convaincu que ses excentricités n'étaient pas si folle. Ce con m'a eu à l'usure.

north_cape_740x334.JPGCe gars-là, fort sympathique et qui peut se targuer d'avoir un prénom aussi court que lui, m'a tout simplement proposé d'aller faire un tour au Cap Nord, le point le plus au Nord de l'Europe occidentale. Pour ceux qui séchaient les cours de géo, c'est en Norvège et depuis Paris l'aller-retour fait dans les 9000 km.

Bref, pas le genre d'endroit où l'on va par-dessus la jambe quand on a un minimum la tête sur les épaules. Mais visiblement, cette qualité ne fait pas partie de nos codes génétiques et nous sommes actuellement à la recherche d'un van qui pourrait nous emmener là-bas. Du genre un vieux Trafic de 1983 avec un frigo et une couchette. Du genre on n'est pas sûr qu'il arrive quoi. Ben oui, le budget est limité. Comme notre sens des réalités.

En plus, nous n'avons que 3 semaines devant nous, avec un départ prévu le 18 août (et peut-être un retour le 19 donc). Alors si vous avez des contacts, un cousin mécano, une belle-soeur qui bosse chez Volkswagen où n'importe quoi qui pourrait nous aider à aller nous peler sur le cercle polaire arctique, on prend !



La citation du jour : < "Et si un jour ou une nuit, un démon se glissait furtivement dans ta plus solitaire solitude et de disait : "Cette vie, telle que tu la vis et l'a vécue, il te faudra la vivre encore une fois et encore d'innombrables fois ; et elle ne comportera rien de nouveau, au contraire, chaque douleur et chaque plaisir et chaque pensée et soupir, et tout ce qu'il y a dans ta vie d'indiciblement petit et grand doit pour toi revenir, et tout suivant la même succession et le même enchaînement - et également cette araignée et ce clair de lune entre les arbres, et également cet instant et moi-même. L'éternel sablier de l'existence est sans cesse renversé, et toi avec lui, poussière des poussières !" - Ne te jetterais-tu pas par terre en grinçant des dents et en maudissant le démon qui parla ainsi ? Ou bien as-tu vécu une fois un instant formidable où tu lui répondrais : "Tu es un dieu et jamais je n'entendis rien de plus divin !" >

Friedrich Nietzsche, Le Gai Savoir

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